l'éloge du monde, 7ème épisode: de Nouakchott à Néma, la "Route de l'Espoir".
La « route de l’espoir » rallie Nouakchott à Néma par le goudron, sur un bon millier de kilomètres. Comme celle « du désespoir » (voir épisode 4) elle est presque aussi droite, tout aussi étroite, mais par opposition, très animée et verdoyante. La circulation y est plus dense aussi : son tracé rapproche les populations des provinces désertiques du nord, qui avant cette route étaient quasi coupées du monde. Dans les deux sens, des camions antiques over- chargées qui convoient de l’eau, des vivres, du gas oil, des marchandises (la plupart made in China) qui alimenteront les marchés, de rares voyageurs européens et des maliens en transit. Dans toutes les petites vallées souvent creusées par un oued, nous traversons des villages construits sans doute en même temps que la route. Mais ce qu’on retient surtout sur ce long parcours, ce sont les piétons sur les bas-côtés, plus prudents que les animaux qui n’hésitent pas à traverser et qui finissent parfois en repas pour les vautours.
Au fil de ce récit, décidé à la hâte (avec son titre pompeux mais sincère) rédigé au jour le jour et de fait résolument engagé dans la spontanéité, je me rends compte des raccourcis, des lacunes, des oublis, des manques. Impossible de tout évoquer et donner à voir: les rencontres, les visages, la joie, le dénuement, la beauté, l'économie, la place de la religion, l'histoire ... Peut-être ce récit ressemble t-il en ce sens à notre voyage, où une étape en appelle une autre, et où, à chaque fois, on est partagés entre rester et poursuivre ... En écho à ce récit, cette information entendue ce 25 décembre 2016, d'une femme enlevée à Gao, au nord du Mali.
Nouakchott, 6 mars - kms 4 951
Nous quittons la capitale mauritanienne en début de matinée, par 19°, pour nous engager sur la route de l’Espoir, non sans avoir fait de nouveaux pleins de carburant. Notre premier bivouac à El Medina, à quelques centaines de mètres de la route, a marqué ma mémoire. Un berger qui abreuve son troupeau et une bande de garçons qui viennent nous rencontrer. Avec le compresseur, des ballons de foot que nous trim(ballons) depuis le départ sont gonflés, à la grande joie des gamins qui attaquent une partie, au coucher du soleil. Leur père interviendra rapidement, arrêtant brutalement et injustement la partie pour les ramener au foyer, peut-être à l’étude des tablettes coraniques. Ce sera l’exception au cours du voyage, mais je sens à ce moment précis, que notre convoi et notre trio dérangent cet homme -à qui nous avions pourtant préalablement demandé l’autorisation de stationner pour la nuit- comme si nous représentions pour ces enfants le « diable ». La tête d’attelage nous pose de nouveaux problèmes, il faut la réparer ou en fabriquer une autre, à ma grande joie puisque cela nécessitera nombre d'arrêts sur la route pour trouver matériaux et outils pour les transformer, et donc pour moi la possibilité de fixer des images ... sans pare-brise !